Propos recueillis par Jean-Sébastien Ferjou.
L’ancienne adjointe d’Alain Juppé à Bordeaux, ex-N°2 des Républicains, fait le bilan de ses cinq années engagées en politique au moment où elle raccroche.
Virginie Calmels a annoncé dans la foulée d’Alain Juppé qu’elle quittait la vie politique, elle s’en justifie mais laisse, pour l’avenir, la porte entrouverte.
Vous avez quitté la vie politique le jour où Nicolas Florian a été désigné comme successeur d’Alain Juppé. Cela signifie que, jusqu’au bout, vous espériez devenir maire de Bordeaux ?
Pas du tout. Dès septembre 2017, j’avais annoncé ma décision de ne pas briguer la mairie de Bordeaux en 2020 devant la totalité des membres de la majorité municipale. Comme beaucoup de femmes, j’ai fait le choix de privilégier d’abord l’intérêt de ma famille en revenant vivre à Paris avec mes enfants. Il ne fait pas mystère que mon homme est premier vice-président de la région Ile-de-France (NDLR : Jérôme Chartier).
Mais pourquoi lâcher précisément votre mandat de première adjointe au maire de Bordeaux au moment où Alain Juppé part ?
Je pensais l’annoncer le mois prochain pour que ce soit effectif fin mai, au moment où l’on entrerait dans la période préélectorale. Sa nomination au conseil constitutionnel a simplement accéléré les choses. La proposition de revenir dans le privé que l’on m’a faite à la fin de l’année 2018 m’a particulièrement enthousiasmée. Je ne pouvais pas la refuser. J’ai toujours considéré la politique comme une mission et non pas comme un métier. Démissionner le même jour qu’Alain Juppé est un joli symbole.
Vous considérez votre « mission » politique comme réussie ou ratée ?
A Bordeaux, j’ai contribué à installer BetClic, Ubisoft, Hermès, OVH, Deezer… c’est plus de 30 000 emplois nets créés en 4 ans, un bilan dont je suis fière. Sur le plan national, j’ai eu la chance incroyable d’avoir été propulsée très haut, très vite, peut-être trop vite car la politique est un temps long. Tête de liste aux régionales de la plus grande région de France après 12 mois en politique. J’ai ensuite été sur sollicitée : par Alain Juppé pour les primaires, puis par François Fillon et enfin par Laurent Wauquiez au nom du rassemblement de la droite. Si on fait le bilan, je crois que je ne pouvais pas refuser ces sollicitations. Au fond, qu’aurait-on pensé si je ne l’avais pas fait ? A chaque fois, je me suis engagée de bonne foi et dans l’intérêt de ma famille politique. Parfois, ça n’a pas été bien compris. Peut-être ne l’ai-je pas bien expliqué. Pourtant, je mets quiconque au défi de dire que je n’ai pas gardé mes convictions. Cette ascension a suscité beaucoup de jalousie. J’ai sans doute fait peur parce que, chef d’entreprise, je suis une femme libre, ne vivant pas de la politique. J’ai un profil atypique en politique avec un parcours atypique qui a été une expérience incroyablement riche !
Vous avez dirigé la société de production Endemol. La politique est-elle plus cruelle qu’une émission de téléréalité ?
La politique, ce sont de très belles découvertes humaines, en proximité directe avec les gens. Mais la politique est-elle encore faite pour les idéalistes ? Vu sa violence, sa dureté, je me pose la question. C’est un mode de fonctionnement très, très différent du monde des affaires. Trop différent, à mon goût. D’ailleurs, dans un pays surendetté, avec 2 200 milliards de dettes, les politiques devraient s’inspirer un peu plus du modèle du monde des affaires qui est plus regardant sur le long terme et sur les indicateurs financiers. Sans meilleure gestion de la dépense publique, il n’y a plus aucune marge de manœuvre politique. C’est un pré requis.
Quel est votre plus gros regret de ces cinq années ?
De ne pas avoir réussi à convaincre Alain Juppé que la campagne qu’il menait à la primaire de la droite ressemblait trop à une campagne de second tour de présidentielle, alors qu’il avait un vrai projet de droite.
Pourquoi gardez-vous votre mandat de présidente de groupe LR à la région Nouvelle Aquitaine ainsi que votre think tank DroiteLib ?
Etant tête de liste, j’ai été élue sur mon nom, donc par respect pour les électeurs, ça me semble naturel d’aller au bout de ce mandat non exécutif. Je crois au débat des idées et c’est évidemment pour ça que je garde le think tank DroiteLib. Ça me passionne. Je pense qu’il y aura d’autres façons pour moi d’être utile à l’intérêt général sans forcément avoir un mandat électif exécutif. Ne serait-ce qu’en créant des emplois ! Engagée un jour, engagée toujours !