À la veille du second tour des élections législatives, l’ancienne numéro deux des Républicains appelle à une reconstruction de la droite. Seul un projet politique alliant libéralisme et souverainisme permettra de retrouver une action publique efficace, argue-t-elle.
Virginie Calmels est chef d’entreprise et ancienne vice-présidente déléguée des Républicains.
Au vu des résultats des récents scrutins, le clivage gauche-droite apparaît pour beaucoup de plus en plus obsolète. L’élection et la réélection d’Emmanuel Macron semblent avoir marqué, puis confirmé, la coupure de la France entre mondialistes et souverainistes.
Les mondialistes apparaissent comme les tenants d’un libéralisme incontrôlé, tant décrié par Jean-Luc Mélenchon et ses affidé; les souverainistes se présentent, à l’inverse, comme les partisans d’une nation forte, dotée d’un État puissant, déliée de tout contrôle supranational, ils sont aussi partisans du protectionnisme voire de l’autarcie assumée.
L’émergence de ces deux blocs a très vite fait l’objet de raccourcis, de caricatures, d’exagérations voire d’anathèmes par chacun des tenants des deux visions. Mais diviser ainsi notre pays en deux camps idéologiques finit par se révéler trompeur et trop simpliste.
En opposant libéralisme et souverainisme, on oublie trop vite que ces deux doctrines peuvent tout à fait se nourrir, se compléter et donc se renforcer mutuellement.
Afin que les libertés individuelles puissent s’épanouir, se développer, croître favorablement, et que le marché puisse fonctionner avec fluidité, il est nécessaire de disposer d’un État souverain.
En effet, la liberté d’agir nécessite d’être souverain de ses décisions. Ainsi, afin que les libertés individuelles puissent s’épanouir, se développer, croître favorablement, et que le marché puisse fonctionner avec fluidité, il est nécessaire de disposer d’un État souverain, doté d’institutions démocratiques et capables d’instaurer un cadre normatif simple et clair. Les libertés individuelles cesseront d’être réclamées puisqu’elles seront effectives.
A contrario, si l’État tend à s’occuper de tout, à s’immiscer de manière inefficace, saturant l’espace public par sa présence constante, le souverainisme tombera dans les affres de l’étatisme. Le souverainisme doit promouvoir un état efficace et fort dans des domaines limités au régalien: sécurité, libertés publiques, flux migratoires, défense, en priorité, plutôt qu’un État submergé par son omnipotence.
De surcroît, libéralisme et souverainisme peuvent être d’efficaces et complémentaires alliés puisque pour retrouver les bonnes marges de manœuvre pour une action publique efficace et souveraine, il est nécessaire de diminuer les dépenses publiques et de faire confiance aux acteurs privés afin de porter haut la croissance économique française.
À l’heure où la dette publique française atteint près de 115% du PIB, et les prélèvements obligatoires 44,5% du PIB, nous pouvons légitimement nous interroger sur nos capacités d’actions réelles, sur nos marges de manœuvre possibles car la question de la dépendance économique et budgétaire peut très vite se poser. Rappelons-nous, même si comparaison n’est pas raison, de la crise grecque de 2014… Ajoutons que l’économie planifiée, partout où elle fut mise en œuvre, a très rapidement montré ses limites. Avec pour conséquences de grands troubles, d’abord économiques, politiques ensuite.
Le seul libéralisme acceptable se doit de ne pas être débridé, ni excessif, ni débordant. Il ne doit pas contrarier les services publics, ni nier les fondements de la nation.
Le philosophe politique Pierre Manent le dit très bien: pour lui la liberté est synonyme d’action. La liberté est désirable si l’on en fait quelque chose de bien. Elle doit, dit-il, être accompagnée d’un sentiment de confiance dans ses propres forces. Cette liberté doit donc être indéfectiblement liée à la confiance en la nation, en l’avenir de celle-ci, en ses capacités, en son destin. Le seul libéralisme acceptable se doit de ne pas être débridé, ni excessif, ni débordant. Il ne doit pas contrarier les services publics, ni nier les fondements de la nation. Libéralisme et souverainisme doivent donc joindre leurs forces.
Seule la droite est aujourd’hui porteuse d’une telle synthèse, en termes de vision et de convictions, mais aussi par la complémentarité de ceux – hommes et femmes d’expérience – qui la représentent. Rappelons que ce projet politique porté par la droite en 2017, proposant cette synthèse entre une liberté économique assumée et un régalien puissant, sans toutefois affaiblir outre mesure l’aspect social, socle du vivre ensemble, a recueilli plus de 20 % des suffrages dans le contexte politique et médiatique épouvantable que l’on sait.
Face au péril évident que représenterait une victoire de la Nupes, ou face au danger de l’immobilisme du «en même temps», la reconstruction de la droite, à commencer par sa présence à l’Assemblée nationale dans une proportion significative, est une nécessité absolue. Soit pour permettre de voter les réformes courageuses indispensables (celle des retraites entre autres), dans le cadre d’un véritable accord de coalition avec la majorité actuelle en lui confortant une majorité absolue ; soit pour préparer l’avenir afin d’éviter dans cinq ans une offre politique réduite aux extrêmes ou aux sortants épuisés par dix ans de pouvoir.
Si pour beaucoup d’électeurs de droite, face à la poussée des extrêmes, le vote utile à la présidentielle fut Emmanuel Macron, dimanche prochain le vote utile doit être Les Républicains.